Certains d’entre vous me prendront de haut et renâcleront à l’idée d’accorder quelques secondes à ce sujet qui semble insignifiant de prime abord, mais ce que vous allez lire constitue un bon exemple de la censure morale mâtinée de médiocrité qui sévit sournoisement en Tunisie. La station radiophonique Mosaïque fm. diffuse en boucle, depuis plusieurs semaines, trois chansons très en vogue : Dalida de Soolking, Bouheli de Balti ( cliquez ici pour écouter ) et Djadja d’Aya Nakamura. Les deux premières chansons se sont vues amputées d’une parole chacune : « merde » pour la chanson de Soolking et « birra » pour celle de Balti. Pour ne pas offenser les oreilles chastes des auditeurs, Mosaïque provoque une sorte de « vide sonore », de « vide langagier », au moment où les chanteurs s’apprêtent à prononcer les deux termes susmentionnés.
En revanche, Aya Nakamura prononce à deux reprises le mot « catin » dans le refrain de sa chanson et cela passe comme une lettre à la poste. Et, tout comme le bonheur, le ridicule n’arrive jamais seul. En effet, le refrain de Djadja a même été repris par des DJ tunisiens célèbres et passe aujourd’hui dans les jingles d’émissions télévisées très suivies du grand public, sans que personne ne s’en offusque. Cela montre à quel point les gens des médias audiovisuels, hormis quelques exceptions, pataugent dans l’ignorance et le conformisme intellectuel le plus étroit.
Cette censure qui se pratique systématiquement au nom de la morale est une preuve flagrante de psychorigidité et d’étroitesse d’esprit. C’est ce puritanisme pathologique qui prédispose les jeunes au fanatisme religieux et qui génère une société de frustrés et d’hystériques aux fureurs et « délires vertueux » prévisibles.
Pierrot LeFou
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