Le président russe, Vladimir Poutine, et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, se sont retrouvésce jeudi à Moscou dans un contexte de tensions extrêmes quant à la situation à Idleb en Syrie. «La situation est devenue si explosive à Idleb qu’il est important que nous puissions avoir des discussions directes», a déclaré le chef d’Etat russe lors d’une conférence de presse commune en amont de la rencontre.
Le président russe, Vladimir Poutine, a annoncé aujourd’hui la conclusion d’un accord sur la cessation des hostilités à Idleb au statu quo, soulignant que l’accord insiste sur l’engagement à l’unité et à la souveraineté de la Syrie et sur la poursuite de la lutte contre le terrorisme dans cette région.
Moscou et Ankara se sont déclarés prêts à démanteler tous les groupes qui, selon le Conseil de sécurité des Nations unies, sont considérés comme terroristes, a déclaré le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, donnant lecture du document commun adopté à l’issue des négociations entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan.
La Russie et la Turquie ont exprimé leur «détermination à lutter contre toute manifestation de terrorisme et à démanteler tous les groupes terroristes que le Conseil de sécurité de l’Onu a reconnu comme tels. La menace aux civils et aux infrastructures ne peut être justifiée par quelque prétexte que ce soit», souligne le document des deux pays qui relèvent leur attachement à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de la Syrie.
En outre, les deux pays soulignent l’importance de prévenir l’aggravation de la situation humanitaire dans le pays, de protéger les civils et d’accorder une aide humanitaire à tous les Syriens qui en ont besoin.
Dans un point de presse qu’il avait tenu au terme de ses pourparlers avec le président Erdogan, à Moscou aujourd’hui, Poutine a dit : « Nous ne nous sommes pas toujours d’accord dans les opinions avec la partie turque sur la situation en Syrie, mais à chaque fois, aux moments décisifs et sur la base du niveau des relations qui nous rassemblent, nous avons pu parvenir à des solutions acceptables », soulignant la conclusion d’un accord sur un document conjoint pour la cessation des hostilités à Idleb au statu quo.
«Le conflit syrien n’a pas de solution militaire et doit être réglé par un processus politique organisé et réalisé par les Syriens eux-mêmes en conformité avec la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’Onu», note la déclaration.
Elle relève également l’importance de contribuer «à un retour volontaire et en sécurité des réfugiés et des personnes déplacées vers leurs foyers en Syrie».
Reconquête d’Idleb
Ces dernières semaines, l’armée syrienne a pu reconquérir près de la moitié de la province d’Idleb, contrôlée depuis des années par les djihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (dont l’une des composantes est le Front al-Nosra, ancienne branche syrienne d’al-Qaïda), ainsi que par d’autres groupes rebelles. L’avancée inexorable de Damas, bien décidée à recouvrir sa souveraineté sur la totalité de son territoire, se fait notamment au détriment des troupes turques. Ces dernières, qui soutiennent militairement des groupes armés dans la région «en violation des accords de Sotchi» selon Moscou, y tiennent également des postes d’observation.
Le 27 février, au moins 33 soldats turcs ont été tués dans des frappes aériennes de l’armée syrienne : les forces de Damas affirment qu’Ankara ne les avait pas informé de la position de ses militaires. Si cet incident tragique a fait monter d’un cran la tension dans la région, il n’en a pas pour autant dissuadé Damas de poursuivre sa reconquête. Le 2 mars, l’armée syrienne a ainsi repris aux rebelles soutenus par la Turquie la ville de Saraqeb, stratégique dans l’optique de sécuriser l’autoroute Alep-Damas (M-5). Le lendemain, l’armée russe a été déployé dans la ville afin d’y mener sa première patrouille, a noté en outre l’agence de presse Tass.
De son côté, Ankara assure que son opération «Bouclier de printemps», lancée après la mort de ses soldats, «se poursuit avec succès». Alors que le controversé Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) a annoncé la mort de 119 soldats syriens depuis le début de l’offensive – un chiffre que n’a pas confirmé Damas – , le ministère de la Défense turc s’est félicité le 3 mars d’avoir abattu un avion L-39 appartenant au gouvernement syrien.
Couloir de sécurité
En outre, la Russie et la Turquie ont convenu d’aménager un couloir de sécurité autour de la route qui relie Alep au gouvernorat côtier de Lattaquié (M4), dans le nord de la Syrie, a déclaré le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, à l’issue des négociations entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan.
«Créer un couloir de sécurité large de six kilomètres au nord et de six kilomètres au sud de la route M4. Les paramètres concrets de fonctionnement de ce couloir seront concertés entre les ministères russe et turc de la Défense dans le courant de sept jours», a-t-il indiqué aux journalistes en donnant lecture du document commun adopté à l’issue des négociations bilatérales à Moscou.
Les rencontres en comités restreint et élargi sous la présidence de Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan se sont poursuivies pendant plus de six heures ce 5 mars à Moscou.
Déclaration conjointe
Les Présidents russe et turc ont réussi à concerter un document commun sur le règlement en Syrie qui prévoit notamment un cessez-le-feu qui doit entrer en vigueur à minuit et selon lequel la Turquie a dépêché des forces supplémentaires à Idlib sur concertation avec la Russie.
En outre, les deux pays ont relevé la nécessité de poursuivre un travail conjoint dans le cadre du format d’Astana (aujourd’hui, Noursoultan), tandis qu’Ankara a exprimé le souhait de poursuivre sa collaboration avec la Russie sur la base du respect mutuel. Recep Tayyip Erdogan a invité Vladimir Poutine en Turquie pour le centième anniversaire des relations diplomatiques entre les deux pays.
Sources : RT et Sputnik