On ferme les bordels tout en sachant que la prostitution ne disparaîtra jamais.

Après avoir été censuré dans plusieurs pays arabo-musulmans à cause d’une scène de baiser entre deux personnages de sexe féminin, la Tunisie rejoint le cortège des pays aux mœurs des pays rustico-bédouines en interdisant à son tour le film d’animation Lightyear. Cela a provoqué une vive indignation chez bon nombre de progressistes. Certains de mes amis qualifient cette censure d’hypocrite et croient que l’objectif de cette interdiction et de ne pas permettre aux Tunisiens l’accès au film.

En fait, et je le dis sans aucune prétention, ils n’ont pas compris le sens de cette censure. Les Tunisiens qui réclament l’interdiction d’un film ou d’une pièce de théâtre savent très bien que les gens peuvent regarder Persepolis, Ni Allah ni maître, Lightyear, Mort sur le Nil, l’affiche d’Ilhakom Ettakathor, qui sont toutes des œuvres censurées en Tunisie, ailleurs qu’à la télé et dans les salles de ciné. En réalité, ils veulent vivre dans un pays où l’Etat censure tout ce qui ne correspond pas à leurs croyances et convictions. Pour eux, l’Etat ne doit pas tolérer, et encore moins cautionner, les pensées et les modes de vie qu’ils abhorrent et qui représentent une menace pour leur système de valeurs conservatrices.

L’exemple des quartiers réservés à la prostitution légale est on ne peut plus éloquent : on ferme les kartis tout en sachant que la prostitution ne disparaîtra jamais. L’essentiel est que l’Etat conforte les liberticides et les Gardiens du Temple de la morale et des bonnes mœurs dans leurs convictions et leur donne l’impression que l’islam et les valeurs rétrogrades qui en découlent dominent la société de fond en comble. Les « gens déviants », c’est-à-dire ceux qui ne partagent pas leurs vérités, ceux dont l’esprit n’a pas été coulé dans le même moule intellectuel et moral que celui du Tunisien conformiste et médiocre, doivent rester en eux comme des rats, s’abstenir de vivre au grand jour leur différence et être pourchassés et réprimés quand ils affirment ouvertement leurs opinions.

Ceci étant, le fait de voir le lobby LGBT instiller sournoisement ce genre de scènes dans les esprits pour que le monde entier s’habitue à l’homosexualité, notamment en forgeant idéologiquement les futures générations, m’exaspère beaucoup. En revanche, la censure m’exaspère encore plus car c’est aux parents de décider si leurs enfants peuvent regarder ce film ou non, ce n’est pas à quelques illuminés rétrogrades de décider pour tout le monde. En plus, censurer une œuvre ne rime à rien de nos jours puisque les gens peuvent y accéder via internet. Bref, le but de cette censure n’est pas de protéger la société contre les dérives du lobby LGBT, mais d’officialiser une doctrine homophobe et très conservatrice.

Pierrot LeFou