Neila Driss rend un dernier hommage au défunt Khémais Khayati

C’était en Octobre 2016. Khémais Khayati venait d’annoncer sur son facebook que l’acteur égyptien Hussein Fahmy était à Tunis pour le tournage d’une émission TV. J’avais écrit comme commentaire que mon rêve était de le rencontrer.

Khemais m’appelle: « c’est vrai que tu rêves de rencontrer Hussein Fahmy? ». Je confirme, en disant que c’était bien sur un rêve irréalisable. Il me répond: « et si je te donne son numéro de téléphone, tu l’appelleras? ». J’avais répondu que je n’oserais jamais faire une chose pareille, que je ne saurais pas quoi lui dire, ni comment me présenter.

Quelques heures plus tard, Khémais me rappelle au téléphone pour me dire qu’il m’avait pris RDV avec Hussein Fahmy à l’hôtel Africa pour une interview, et que je devais donc y aller.

Je n’en croyais pas mes oreilles. Mais j’avais paniqué totalement. Je n’avais je crois, jamais interviewé personne, et surtout pas une grande star, et je ne savais pas du tout comment faire et que dire. Mais Khémais m’avait rassurée et encouragée, en m’assurant que je m’en sortirais très bien.

La veille du RDV, j’avais épluché Internet pour essayer de tout connaitre sur Hussein Fahmy, mais comme actualité récente, je n’avais trouvé à l’époque que des dizaines et des dizaines d’articles sur ses divers mariages et divorces, et pas grand chose que ses derniers films.

J’étais arrivée à l’interview et j’avais dit d’emblée à Hussein Fahmy: « j’ai épluché Internet à votre sujet, mais je n’ai trouvé que des tonnes d’articles sur vos divers mariages, et j’avoue que cela ne m’intéresse pas du tout. Je souhaiterais plutôt que vous me parliez de votre carrière d’artiste, de votre émission TV, de votre relation par rapport à la Tunisie… ». Il avait éclaté de rire et m’avait répondu qu’il était tout à fait d’accord avec moi.

L’interview s’était très très bien passée. Elle avait eu du succès en Tunisie et avait même été publiée sur le grand journal El Ahram en Egypte. En première page et sur plus de la moitié de la page!!
Khémais avait été très fier de moi. Et comme à son habitude, il m’avait félicitée.
En Novembre 2016, c’est aussi Khémais qui m’avait ouvert les portes du festival du Caire. J’en parlerais dans une autre publication.

C’est aussi cela qui caractérise Khémais: cette bonté, et cette très grande générosité. Il était toujours présent pour aider, pour conseiller, pour guider….

Allah yarhmek Khémais Khayati. Tu étais l’ange gardien de tous ceux qui aimaient le cinéma. J’espère que là haut, tu retrouveras tous tes amis du cinéma.

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Khémais Khayati, un nom empreint de chaleur, de bienveillance et de générosité dans le monde du cinéma. C’est grâce à lui, en grande partie, que j’ai pu réaliser l’un de mes rêves : couvrir le prestigieux Festival du Caire.

En mai 2016, alors que je me trouvais au Festival de Cannes, le film égyptien « Clash » faisait pratiquement l’unanimité dans la section « Un certain regard ». Pendant 10 jours, on ne parlait que de ce film magnifique, et j’attendais le palmarès avec une très grande impatience, persuadée que ce film repartirait avec au moins un prix. Cependant, la soirée de clôture s’est déroulée sans qu’aucun prix ne lui soit décerné, et j’étais très profondément déçue.

Après la cérémonie, alors que je restais dans la même salle en attendant la prochaine projection, une dame assise à quelques fauteuils de moi avait attiré mon attention. Elle semblait arabe, peut-être égyptienne. Engager la conversation avec elle avait été une impulsion naturelle. Je lui avais exprimé ma forte déception et ma tristesse. Nous avions discuté de cinéma, de films, et au fil de la conversation, je lui avais confié mon rêve d’assister au Festival International du Film du Caire. J’avais mentionné que je cherchais un moyen d’obtenir une accréditation. C’est alors qu’elle s’était présentée : Mme Magda Wassef, présidente du Festival International du Film du Caire !

J’étais abasourdie!

Elle m’avait donné sa carte de visite et m’avait demandé de lui écrire pour qu’elle puisse m’envoyer une invitation.

Sur le moment, j’étais remplie de joie, mais le doute avait rapidement pris le dessus. J’étais sûre qu’elle aurait rapidement oublié cette inconnue qui l’avait abordée dans une salle de cinéma.
Les mois ont passé, et je n’ai jamais envoyé cet e-mail.

En octobre, lors d’une discussion avec Khemais, il m’avait appris qu’il avait été invité au Festival du Caire. Je lui avais alors raconté ma rencontre avec Mme Magda. À ma grande surprise, il m’avait révélé qu’elle était une de ses amies très proches et m’avait vivement conseillé d’écrire cet e-mail. Face à mon incertitude, il m’avait proposé de mentionner son nom. J’hésitais, persuadée qu’elle m’aurait déjà oubliée, mais Khemais avait insisté, me disant que de toute façon, j’avais tout à y gagner et rien à y perdre. Le pire est qu’elle ignorerait mon e-mail !

Trois jours après avoir envoyé l’e-mail, j’avais une accréditation pour le festival!

Et c’est ainsi qu’en novembre 2016, Khemais et moi étions ensemble au Festival du Caire. Et là, il avait été pour moi un parrain protecteur, me présentant à tout le monde, me guidant sur la manière de couvrir un festival, et me prodiguant de précieux conseils. Il était constamment à mes côtés, m’entourant de son attention et de ses encouragements. Sa gentillesse et son soutien inébranlable ont illuminé mon parcours. C’est aussi grâce à lui que j’ai pu faire une bonne couverture du festival, satisfaisant les organisateurs et me permettant de renouveler mon accréditation les années suivantes.

La générosité de Khemais allait bien au-delà de ce que les mots peuvent exprimer. Et en parcourant les témoignages que j’ai lus ces derniers jours, je m’aperçois qu’il agissait ainsi avec tous ceux qui partageaient sa passion pour le cinéma, les prenant sous son aile protectrice et leur offrant un soutien indéfectible. Son amour pour le cinéma était contagieux, et il cherchait toujours à encourager et à inspirer les autres. Khemais était une âme bienveillante, un véritable mentor qui a su transmettre sa passion avec une générosité sans limites. Paix à son âme.

Neila Massir Driss