Une délégation de cheikhs druzes syriens s’est rendue en Israël vendredi 14 mars pour la première fois depuis cinquante ans sur fond de soutien affiché de l’État hébreu à cette communauté religieuse dans la Syrie de l’après Bachar el-Assad.
À bord de trois bus blancs escortés par des véhicules militaires israéliens, plusieurs dizaines de religieux ont traversé la ligne de cessez-le-feu à Majdal Shams, dans la partie du Golan syrien occupée par Israël peu avant 11h30 (09h30 TU), ont constaté des journalistes de l’AFP.
Selon une source au sein de la communauté, ils ont rencontré le chef religieux des druzes d’Israël, cheikh Mowafaq Tarif, à Julis, dans le nord du pays, avant d’aller prier près de Tibériade sur le site du tombeau de Nabi Chouaïb, plus haut lieu saint druze en Israël où ils sont arrivés dans la soirée.
Plusieurs centaines de personnes ont accueilli les pèlerins en chantant et dansant, agitant des drapeaux vert, rouge, jaune, bleu et blanc, les couleurs de cette communauté. D’autres tiraient des coups de feu en l’air. Tous étaient habillés de noir et portaient la coiffe traditionnelle blanche et rouge.
Précédente visite qui remonte à 1973
Dans un entretien à une télévision arabe, le cheikh Tarif a indiqué que la dernière venue de druzes syriens sur la tombe de Nabi Chouaïb remontait à « environ 51 ans », soit vraisemblablement 1973, année de la quatrième guerre israélo-arabe au cours de laquelle la Syrie avait tenté, en vain, de reprendre la partie du Golan conquise par Israël en juin 1967.
Dès la chute à Damas du pouvoir de Bachar el-Assad le 8 décembre, Israël a envoyé des troupes dans une zone tampon démilitarisée du Golan , dans le sud-ouest de la Syrie, à la lisière de la partie de ce plateau occupée puis annexée par Israël en 1981. Seuls les États-Unis, sous la première administration de Donald Trump, ont reconnu cette annexion en 2019.
Israël assure avoir pris le contrôle de la zone tampon pour « défendre » les communautés qui vivent sur le plateau du Golan et les citoyens israéliens. Le porte-parole du gouvernement israélien, David Mencer, a indiqué jeudi que 10 000 colis d’aide humanitaire avaient été fournis à « la communauté druze dans des zones de combat en Syrie » ces dernières semaines.
Les Druzes, adeptes d’une religion ésotérique issue de l’islam, sont répartis entre la Jordanie, le Liban, Israël, et la Syrie. Les Druzes d’Israël forment une minorité arabophone d’environ 150 000 personnes réputée pour son patriotisme, et sont surreprésentés dans l’armée et la police par rapport à leur nombre.
Début mars, à la suite de tensions dans une banlieue de Damas à majorité druze et chrétienne, le ministre israélien de la Défense, Israel Katz, a menacé d’une intervention militaire si les autorités syriennes s’en prenaient aux Druzes. Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l’unité de la Syrie.
Crainte que la région ne devienne une zone occupée face à l’absence des nouvelles autorités
Depuis la chute du régime de Bachar el-Assad en décembre, le sud syrien évolue avec au gré des incursions de l’armée israélienne en Syrie. Dès le lendemain de la révolution, les chars israéliens sont apparus, marquant leur présence. Pendant ce temps, les nouvelles autorités de Damas, elles, sont absentes de la zone, laissant un vide que beaucoup observent avec inquiétude, comme a pu le constater le correspondant de RFI à Damas, Mohamed Errami.