J’ai assisté samedi 15 février au sein de l’Association de sauvegarde de la Ville Monastir à une rencontre extraordinaire : Deux jeunes Françaises animatrices de radio en Bretagne, dont l’une est en plus musicienne et l’autre documentariste de son état, nous ont épatés par une recherche sur la mémoire immatérielle de Monastir, unique en son genre. Travaillant sur des enregistrements phoniques historiques livrés par des prisonniers en Allemagne de la première guerre mondiale, en 1916, elles ont découvert les enregistrements de 6 prisonniers tunisiens dont celui d’un Monastirien, fiché, Sadok Ben Rachid. C’est tout. La recherche menée sur le terrain, via le musicien monastirien (de renommée internationale) Jasser Bel Haj Yossef, les conduit vers le père de celui-ci, Hassine Bel Haj Yousssef (alias Jeddi !) qui est lui aussi professeur de musique et fin connaisseur de la musique populaire (en plus des traditions d’une façon générale ; sa maman aussi était dans une troupe de Madania, belle lignée !). Celui-ci parvient grâce à des recoupements de tradition orale et au genre musical à reconnaître la voix de son grand père maternel qu’il ne connaissait pas. Entendre la voix d’un Tunisien enregistrée en 1916, et qui plus est d’un Monastirien (en ce qui me concerne) était pour moi d’une très grande émotion, car en la ressuscitant, on découvre un genre musical populaire (inconnu jusqu’alors à Monastir), les paroles usités à ce moment là, l’intonation des mots, le parler monastirien etc. Très belle approche anthropologique de notre culture patrimoniale immatérielle. C’est tout simplement extraordinaire ! Toute mon admiration aux amies françaises pour leur passion et pour leur amour exprimée pour ce personnage, notre regretté prisonnier-musicien et parolier Monastirien, et merci à l’ASVM pour cette bonne initiative de collecte de la mémoire collective.
Nabil Kallala