Mohammed ben Salmane paye 600 millions de dollars pour une fausse toile de Léonard de Vinci

Est-ce que vous venez de perdre 601 millions de dollars?

Non? Alors vous passez probablement un meilleur mercredi que le prince héritier d’Arabie saoudite.

Mohammed ben Salmane ( MBS ) a versé , lundi 27 mai , plus d’un demi-milliard de huards pour une œuvre qu’il croyait avoir été peinte par Léonard de Vinci.

En 2017, le Salvator Mundi (le «Sauveur du monde», en latin) avait été vendu aux enchères comme une des seules toiles connues du maître italien. Moins de vingt tableaux, en tout et partout, sont attribués à ce dernier.

Sur 65 cm par 45 cm, on y voit le Christ sur fond ténébreux, bénissant d’une main le monde tout en tenant un globe transparent dans l’autre. Le Salvator Mundi, tableau attribué à Léonard de Vinci, est auréolé de mystère. Jusqu’à ses dernières aventures : après avoir été vendu en novembre 2017 chez Christie’s, à New York, pour plus de 400 millions d’euros – ce qui en fait le tableau le plus cher du monde –, il a, depuis, disparu.

Une guerre d’enchères intense entre MBS et le milliardaire chinois Liu Yiqian ont fait monter le prix de l’œuvre à cette somme astronomique.

Un membre de l’équipe du Sac de chips a déjà participé à une bataille semblable pour gagner une figurine à l’effigie du power droid de Star Wars et a gagné.

Mohammed ben Salmane est donc devenu propriétaire du Salvator Mundi de Léonard de Vinci, la toile la plus chère de l’histoire du monde.

Mais c’est ici que ça se corse.

Depuis qu’il a fait partie d’une exposition importante du National Art Gallery en 2011, plusieurs questions ont été soulevées par rapport à l’origine du tableau.

Des rumeurs ont commencé à circuler que de Vinci ne serait peut-être pas le peintre responsable du tableau.

Plusieurs historiens de l’art croient que la façon dont la main qui tient l’orbe a été peinte n’est pas conséquente avec le talent d’un artiste comme de Vinci.

C’est ici que ça se corse encore plus.

Les curateurs du Musée du Louvre à Paris ont officiellement changé l’étiquette de l’œuvre dans leurs archives.

Maintenant, au lieu de provenir de Léonard de Vinci, l’œuvre serait originaire de l’atelier de ce dernier.

Elle aurait vraisemblablement été peinte par un de ses étudiants.

Selon ces nouvelles informations, les experts estiment que si la toile était vendue aujourd’hui, elle rapporterait environ 2 millions de dollars.

MBS, qui a 33 ans, a plus de 10 milliards de dollars à son nom, donc ce pépin financier ne devrait pas faire en sorte qu’il soit obligé de dormir au YMCA.

« Seulement 5 à 10 % de la main de Léonard »

Salvator Mundi devait être exposé en septembre 2018 au Louvre Abu Dhabi. Or le musée émirati a annoncé, à la surprise générale, le report de l’exposition. Puis, pour son événement à venir, « le Louvre a demandé au Département de la culture et du tourisme d’Abu Dhabi le tableau en prêt », a confié le musée parisien à l’AFP. Mais « nous n’avons pas encore la réponse », ajoute-t-il.

Sur la localisation actuelle du tableau, les experts sont partagés et certains estiment qu’il n’est jamais arrivé au Louvre Abu Dhabi, évoquant même « un musée, à Genève ». « Le passage en Suisse, je n’y crois pas trop, précise Jacques Franck. Pour moi, il est au Louvre Abu Dhabi. » Selon le spécialiste, il faut voir l’origine de tous ces mystères dans le doute quant à la paternité de l’œuvre, qui pourrait avoir été réalisée par des élèves de Léonard de Vinci.

« Certains détails ne trompent pas », comme la mauvaise exécution d’un doigt, « anatomiquement impossible », affirme Jacques Franck. « Je n’y vois que 5 à 10 % de la main de Léonard de Vinci. » Or, sans la certitude que le maître a bien signé cette toile, il est possible que son propriétaire rechigne à prêter le tableau tant que les experts ne se sont pas entendus.

Jésus représenté en Dieu

« Le Louvre Abu Dhabi est un musée récent et donc très moderne, qui dispose de techniques de pointe et d’appareils scientifiques très performants. Sans doute le tableau est-il examiné là-bas », s’avance Jacques Franck.

Selon Artprice, leader mondial des banques de données sur la cotation de l’art, les oulémas (théologiens) de l’université Al Azhar du Caire ont déconseillé à Mohammed ben Salmane de s’afficher avec le tableau pour des raisons religieuses : Jésus est considéré comme un prophète, mais le tableau le représente en tant que sauveur du monde, donc Dieu, représentation impossible en islam.

D’autres sources, notamment des historiens des religions, corroborent cette opinion. D’ores et déjà, le musée parisien annonce que l’exposition d’octobre consacrée à Léonard de Vinci ne sera accessible que sur réservation, en raison d’une affluence exceptionnelle des visiteurs. Le Christ s’y trouvera-t-il ? Mystère.

Source : Le journal de Montréal et 20minutes.fr