Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre ont annoncé mercredi que l’abbé Pierre, icône de la lutte contre l’exclusion, est accusé, dans un rapport, d’agressions sexuelles par sept femmes. Aucun signalement à la justice n’a été fait à ce stade.
Longtemps personnalité préférée des Français, l’abbé Pierre, de son vrai nom Henri Grouès, est accusé, dans un rapport, d’agressions sexuelles par plusieurs femmes, ont annoncé mercredi 17 juillet, dans un communiqué commun, Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre. Les faits auraient été commis entre la fin des années 1970 et 2005.
Selon une source interne à Emmaüs, aucun signalement à la justice n’a été fait à ce stade, alors que l’abbé Pierre, qui s’était donné pour mission d’en finir avec le mal-logement et la précarité, est mort le 22 janvier 2007.
À la suite « d’un témoignage faisant état d’une agression sexuelle commise par l’abbé Pierre sur une femme », un travail a été mené en interne par le cabinet expert de la prévention des violences Egaé, écrivent les trois associations.
« Ce travail a permis de recueillir les témoignages de sept femmes qui font état de comportements pouvant s’apparenter à des agressions sexuelles ou des faits de harcèlement sexuel commis par l’abbé Pierre entre la fin des années 1970 et 2005 », ajoutent les trois organisations, qui précisent que l’une d’entre elles « était mineure au moment des premiers faits ».
« Nous les croyons »
« Nous saluons le courage des personnes qui ont témoigné et permis, par leur parole, de mettre au jour ces réalités », soulignent Emmaüs France, Emmaüs International et la Fondation Abbé Pierre.
« Nous les croyons, nous savons que ces actes intolérables ont laissé des traces et nous nous tenons à leurs côtés », ajoutent-elles. « Ces révélations bouleversent nos structures » et « ces agissements changent profondément le regard que nous portons sur un homme connu avant tout pour son combat contre la pauvreté, la misère et l’exclusion ».
Dans son rapport, Egaé indique avoir entendu « 12 personnes dans le cadre de l’enquête, dont certaines n’ont pas été la cible de comportements » du prêtre, et avoir eu accès à « deux témoignages adressés fin juin 2024 à une personne d’Emmaüs International ».
Au total, le cabinet dit avoir été destinataire de témoignages de sept personnes « faisant état de violences subies par des femmes de la part de l’abbé Pierre sur une période allant de la fin des années 1970 à l’année 2005 ».
Parmi les faits remontés, « des comportements inadaptés d’ordre personnel, une proposition sexuelle, des propos répétés à connotation sexuelle, des tentatives de contacts physiques non sollicités, des contacts non sollicités sur les seins ».
Une des femmes rapporte ainsi que l’abbé Pierre s’est mis à lui « tripoter le sein gauche » alors qu’elle se trouvait « au pied de l’escalier, un endroit de type sas ».
Quelques années plus tard, elle raconte une autre scène dans un bureau. « Je me suis avancée vers lui pour lui serrer la main. Il a essayé de m’attirer vers la fenêtre. Je lui ai dit : ‘Non, Père’. Il m’a dit : ‘J’en ai besoin’. J’ai dit ‘non’, il est parti. »
Une autre indique qu’un jour, « au moment de lui dire au revoir, il a introduit sa langue dans ma bouche d’une façon brutale et totalement inattendue ».
« Sidération »
De cette série d’entretiens ressort « une forme de sidération lors des faits », écrit l’autrice du rapport, Caroline de Haas, qui pointe une « forme d’emprise alimentée par la différence d’âge, le statut de l’abbé Pierre et une forme d’idolâtrie, ou la situation de subordination entre lui et les personnes ».
À la suite des premiers récits, un dispositif de recueil de témoignages et d’accompagnement, « strictement confidentiel, s’adressant aux personnes ayant été victime ou témoin de comportements inacceptables de la part de l’abbé Pierre », a été mis en place, selon les trois associations.
Selon une source interne à Emmaüs, aucun signalement à la justice n’a été fait à ce stade.
À la suite de ces révélations, l’Église catholique en France a déclaré mercredi sur X avoir appris « avec douleur » les conclusions du rapport. Attendant de prendre connaissance du rapport publié, la Conférence des évêques de France « tient à assurer les personnes victimes de sa profonde compassion et de sa honte que de tels faits puissent être commis par un prêtre », souligne ce message publié peu après ces révélations.
Avec France24 et AFP