Hakim Tounsi
Open Sky : Avis aux intéressés !
Personnellement j’ai perdu beaucoup de temps sur ce sujet et je vais en perdre encore pour conclure définitivement sur ce sujet.
Non je ne suis pas contre l’Open Sky parce que je suis tour-opérateur. Réfléchissez deux secondes, qu’est ce qui est selon vous le plus difficile de faire de la production TO et d’affréter des avions charter en prenant des risques ou d’installer un logiciel pour vendre des forfaits en dynamic-pakcaging ! Vous nous prenez pour des manchots alors que nous sommes équipés de la meilleure technologie web depuis la création. Nous avons migré du Minitel vers les sites internet. N’est pas Monsieur Lotfi Gabsi Advences 1998 !
Revenons à l’Open Sky
1/ L’Open Sky ne donnera pas plus de volume à la Tunisie. Pourquoi ?
Le pavillon tunisien n’a jamais pu profiter de ses 50% de part de marché vis-à-vis des pavillons étrangers et a plafonné vers les 37 ou 38% laissant volontiers aux autres partenaires les 12% qui devaient lui revenir de fait. N’est-ce pas là la preuve que le Ciel Tunisien a toujours été ouvert sans problème ? Donc s’il y avait une potentialité d’évolution de trafic le cadre actuel l’aurait absorbée sans soucis.
2 / Une autre poche qui pourrait absorber une augmentation de trafic avant d’aller à programmer de nouveaux vols c’est de mieux remplir les vols déjà programmés. Le taux de remplissage moyen des avions avoisine les 70%. Il reste donc 30% à remplir avant de voir de nouveaux avions débouler vers les aéroports tunisiens
3 / Si le pavillon tunisien ne craint pas les pavillons étrangers et leur donne volontiers les parts qu’il ne peut exploiter lui-même pourquoi cette crainte de l’Open Sky.
Comme le volume n’augmente pas naturellement le seul moyen pour les nouveaux entrants d’avoir une part de marché sera de baisser les prix pour piquer les clients de ceux déjà en place ou pour aller chercher des clients ne voyageant qu’encore moins cher que cher !
Le souci est que le volume de passagers traité actuellement sur la Tunisie avec une offre de sièges supérieure à la demande, se fait à des tarifs qui génèrent déjà des pertes colossales aux compagnies en place sans exception. Pour ne parler que de la perte de Tunisair, de Transavia et de Nouvelair nous totalisons 300 millions de dinars par an !
Un billet paris/Tunis/Paris est vendu sur dix mois de l’année à un prix entre 120 et 170€ TTC. En enlevant les taxes aéroportuaires qui ne reviennent pas aux compagnies mais aux aéroports, il reste aux compagnies aériennes entre 50 et 100€ par passager alors que le prix de revient Hors taxes aéroportuaires serait de l’ordre de 140 à 170€. Ceci engendre des pertes d’exploitation autour d’une moyenne de 50€ par passager transporté.
Si de nouvelles low cost, décideraient pour des raisons stratégiques d’implantation et de prise de part de marché à long terme, il leur sera incontournable de baisser encore les tarifs et c’est là tout le danger pour les compagnies opérant déjà sur l’axe à commencer par les tunisiennes qui souffrent de pertes antérieures et sont incapables de faire un pas de plus vers la descente aux enfers !
Et pourquoi me diriez vous une Low Cost viendrait perdre de l’argent en Tunisie.
Très bonne question.
D’abord pour vous mettre à l’aise et moi aussi je vous dis que cela existe et je donne l’exemple de Transavia France créée en 2007 et qui a toujours un résultat cumulé négatif !
Transavia est une filiale KLM Air France et sa création est stratégique car la France ne peut pas être en dehors de l’industrie du Low Cost même si elle devait perdre tout l’argent du monde.
Il a été estimé par les experts que la taille minimale d’une Low Cost devait être de 100 avions, Transavia aura 100 machines tôt ou tard et à n’importe quel prix même si elle devait les faire voler vers n’importe quel pays qui la laisserait faire.
Transavia France a 28 avions et Transavia Europe a au total 68 machines. En 2015, Transavia France a préparé un plan de vol pour effectuer des lignes régulières intérieures en France. Ce plan n’a pas pu être exécuté car il y a eu l’opposition du syndicat de pilotes d’Air France qui voyait d’un mauvais œil un tel programme. Transavia a alors annulé ce programme te a redéployé ses avions vers le Maroc, la Tunisie et Malte (les pays qui l’ont laissé faire !).
Le programme de flotte prévoit que Transavia atteigne d’ici 2 à 3 ans sa centaine de machines et il lui faudra bien évidemment les faire voler mes amis !
Transavia a fait des pertes cumulées sur ses dix années d’existence mais elle a été recapitalisée par son actionnaire principal KLM Air France et elle est prête à continuer le chemin.
S’il faudra au passage vendre le Paris/Tunis/Paris à 99€ TTC voir quelques coup à 49€ TTC alors que la taxe est de 70€, ils le feront et ils mettront 4 rotations par jour au lieu de 2.
Tunisair et Nouvelair devront suivre ou jeter l’éponge.
Cela c’est Transavia car je ne vous ai pas encore parlé du Low Cost Ryanair premier transporteur européen avec 40 millions de passagers par an, qui fait voler 400 avions avec un chiffre d’affaires de 20 milliards de TND et un bénéfice de 7 milliards de TND. Ryanair est inscrit depuis 2015 à Bruxelles au Registre de Transparence des Représentants d’Intérêts qui est un lobby défendant les intérêts de groupes privés et exerçant des pressions ou influences sur des personnes et institut détentrice de pouvoir. Ryanair a déclaré en 2015 avoir dépensé 300.000€ soit près d’1 million de dinars pour cette activité.
Le second transporteur européen Easyjet avec 280 avions, 15 milliards de dinars tunisiens de chiffre d’affaires par an et un bénéfice de 1,8 Milliards de dinars.
A titre de comparaison Tunisair qui exploite 29 avions ferait 2,8 millions de passagers en 2017 avec un chiffre d’affaires de 1,2 Milliards de dinars et des pertes d’exploitation que je me garderais de citer car la compagnie qui est cotée en bourse n’a pas déclaré ses chiffres.
Pour ceux qui sont amoureux du Maroc, la compagnie de sa Majesté la Royal Air Maroc exploite 58 machines transporte 6,8 millions de passagers avec un chiffre d’affaire de 6,8 milliards de dinars tunisiens et un résultat qui serait positif de l’équivalent 50,3 Millions de dinars tunisiens.
Pour moi, la plus grosse crainte de l’Open Sky serait de voir les mastodontes rentrer en force en Tunisie pour des raisons stratégiques mais sur la base de données tarifaires déconnectées de toute réalité pour créer un effet de pub et s’accaparer les clients existants, entrainant encore les compagnies tunisiennes dans des difficultés sans nom !!!!
J’avais personnellement appelé, pour éviter un tel scénario, au moins à la création d’un commissariat général de contrôle de de la loyauté de la concurrence pour éviter les tarifs qui d’autres fondements que les stratégies hégémoniques d’implantation de ces mastodontes.
Je suis certain que demain le consommateur applaudira un 49€ TTC lancé par Ryanair sur un aéroport tunisien au départ de Paris et personne ne se posera la question si cela correspondait à une logique économique transparente ou non !!!!
La partie n’est pas simple.
Dans d’autres analyses je vous ai déjà démontré comment cette politique tarifaire suicidaire mais qui reste à la portée des grosses compagnies aériennes pour des raisons rappelons le politiques et stratégiques, je vous ai expliqué comment cela tue le tour opérating et le charter car les tour opérateurs fuient tout simplement la guerre perdue d’avance contre les low cost qui pratiquent des prix en B2C (directement vers le consommateur) encore moins chers que ceux auxquels les Tour opérateurs achètent leurs locations charter au prix de gros.
Les tour opérateurs achètent à 270€ TTC et se retrouvent à se bagarrer sur le marché avec des compagnies aériennes qui vendent elles mêmes ce même siège à 120€ TTC. Devant cette situation intenable les tour opérateurs fuient les destinations et refusent de faire une guerre qui n’est pas la leur, celle des compagnies aériennes.
En conclusion : Open Sky oui et la Tunisie a toujours eu un ciel ouvert, par contre gabégie et la loi de la jungle c’est non car préjudiciable en premier aux plus faibles.
Observez bien la jungle et revenez vers moi !
Hakim Tounsi