Israël saisit un corridor clé à Gaza et continue son offensive sur la presque totalité de l’enclave

L’armée israëlienne a annoncé samedi 12 avril l’extension de son offensive à la plus grande partie du territoire palestinien ravagé par la guerre, ses troupes prenant le contrôle d’un corridor clé dans le sud de la bande de Gaza. Par cette saisie du corridor de Morag, les forces israéliennes coupent essentiellement la ville de Rafah du reste de l’enclave. Elles ont également appelé les habitants de Khan Younès à évacuer.

Après deux mois de trêve, Israël a repris ses bombardements aériens suivis d’opérations terrestres à Gaza, le Premier ministre Benyamin Netanyahu estimant qu’une pression militaire accrue était le seul moyen de forcer le Hamas à rendre les otages.

« Bientôt, les opérations des forces israéliennes s’intensifieront et s’étendront à d’autres zones dans la plus grande partie de Gaza, et vous devrez évacuer les zones de combat », a indiqué le ministre de la Défense Israël Katz, s’adressant à la population palestinienne.

Il a aussi annoncé que l’armée avait pris le contrôle de l’axe clé de Morag, qui sépare les villes de Rafah – près de la frontière égyptienne – et de Khan Younès, dans le sud du territoire palestinien dévasté et assiégé. L’armée a ensuite appelé les habitants de Khan Younès à l’évacuer, en prévision d’une opération de représailles à des roquettes tirées depuis le sud de Gaza vers Israël. L’attaque sur Khan Younes est promise d’une force extrême par l’armée israélienne.

À coup de déplacements de population, ce sont près des deux tiers de Gaza qui seront sous contrôle militaire direct israélien. La population est poussée à se rassembler sur un territoire de plus en plus restreint et privé d’aide humanitaire. Objectif affiché : accentuer la pression sur le Hamas pour l’obliger à rendre les otages israéliens. Autre objectif désormais affiché aussi par le gouvernement israélien : mettre en œuvre le plan du président américain Donald Trump dit de « migration volontaire » hors de Gaza.

En moins d’un mois, plus de 1 560 Palestiniens ont été tués, ce qui élève le bilan à plus 50 900 morts à Gaza depuis le début de l’offensive israélienne. Sur place, les Gazaouis décrivent des scènes d’apocalypse.

« C’était comme l’Apocalypse » : à Rafah, un paysage de désolation

Ces nouvelles mesures israéliennes sont annoncées alors que les Palestiniens fuient Rafah, une ville défigurée, avec ses quartiers résidentiels anéantis. Sur le trajet de cette énième fuite, Shirin Dirbi a le souffle coupé et les yeux emplis de larmes, relate le correspondant de RFI sur place, Rami El Meghari. « Rafah, les quartiers Saoudi 1, Saoudi 2, Barahma… Quand le chauffeur y est passé, c’était comme l’Apocalypse. C’était un paysage surnaturel. Pas une pierre, pas un arbre n’était debout », raconte-t-elle.

À Al Mawasi, zone dite humanitaire, mais jamais épargnée par le feu israélien, Shirin a retrouvé un voisin, Wael Moussa. « Pour enlever tous les décombres que j’ai vus, toutes ces destructions, il faudra de longues années. Que Dieu tout-puissant nous vienne en aide et nous délivre de cette tragédie, de cette réalité que nous vivons »,

Que cherche à faire l’armée ? L’écrivain Faïz Abou Chamala originaire de Khan Younès a entendu les propos de Benyamin Netanyahu la semaine dernière : le Premier ministre israélien veut « mettre en œuvre le plan Trump, de migration volontaire ». « Les Israéliens cherchent à assiéger les habitants dans cette petite zone isolée, entre les axes Philadelphie et le nouvel axe qui s’appelle Morag. Avec pour objectif, le moment venu, de faire partir les gens en direction de l’Égypte », indique Faïz Abou Chamala.

Loin d’être un exil volontaire, si ce plan était bien mis en œuvre, il s’apparenterait à un transfert forcé de population. Une mesure constituant un crime au regard du droit international, a encore rappelé le haut-commissariat des droits de l’Homme de l’ONU.