Le Conseil des ministres algérien a adopté, le 20 avril, un projet de loi portant sur les modalités d’une “mobilisation générale”. La disposition est prévue par la Constitution. mais le moment interroge au sein de l’opinion publique : Alger est en effet pris dans de nombreuses tensions diplomatiques avec ses voisins.
Un timing qui interroge. Le Conseil des ministres algérien a adopté dimanche 20 avril un projet de loi encadrant la mobilisation générale, qui permettrait à l’Algérie de basculer dans la guerre, a annoncé le Conseil dans un communiqué relayé, notamment, par l’Algérie Presse Service, réputée proche du pouvoir. Ce texte précise les «dispositions liées aux modalités d’organisation, de préparation et de mise en œuvre de la mobilisation générale, prévue à l’article 99 de la Constitution», détaille le média local TSA.
État d’urgence, de siège ou de guerre
L’article 99, qui souligne que «le président de la République décrète la mobilisation générale en Conseil des ministres», fait partie d’une série d’articles (97 à 102) projetant diverses situations extrêmes.
Ainsi, l’article 97 stipule que le président de la République, actuellement Abdelmadjid Tebboune, «décrète» «en cas de nécessité impérieuse» «l’état d’urgence ou l’état de siège, pour une durée maximale de trente jours et prend toutes les mesures nécessaires au rétablissement de la situation».
L’article 98 indique que «lorsque le pays est menacé d’un péril imminent dans ses institutions, dans son indépendance ou dans son intégrité territoriale, le président de la République décrète l’état d’exception pour une durée maximale de soixante jours».
L’article 100 prévoit lui que le président de la République peut «déclarer la guerre en cas d’agression effective ou imminente», et qu’il en «informe la Nation par un message».
Quant à l’article 101, il donne «tous les pouvoirs» au président durant «l’état de guerre».
Multiples tensions
Le projet de loi était déjà à l’ordre du jour du Parlement en octobre dernier. Il n’empêche que son adoption dimanche interroge, alors qu’Alger est au cœur de multiples tensions, notamment avec Rabat et Paris.
Depuis près de 50 ans, l’Algérie et le Maroc s’écharpent au sujet du Sahara occidental, territoire dans le sud du Maroc, dont la souveraineté est revendiquée par Rabat d’un côté et les indépendantistes du Front Polisario, soutenus par Alger, de l’autre. Un conflit armé oppose les deux camps depuis la fin d’un cessez-le-feu en novembre 2020, après le déploiement de troupes marocaines dans une zone tampon de l’extrême sud du Sahara occidental pour en déloger des indépendantistes, qui bloquaient la seule route commerciale vers l’Afrique de l’Ouest. Les tensions sont depuis au firmament : l’Algérie a traité le Maroc de «régime sioniste», fermé son espace aérien aux vols marocains, et imposé des visas à «tous les étrangers détenteurs d’un passeport marocain».
La querelle algéro-marocaine s’est d’ailleurs amplifiée en juillet 2024, lorsque Emmanuel Macron, dans une lettre adressée au roi Mohamed VI, a apporté son soutien au plan d’autonomie marocain sur le Sahara occidental, reconnaissant la souveraineté du royaume sur le territoire. «Le gouvernement français a fini par donner sa caution franche et catégorique au fait colonial», avait réagi le gouvernement algérien, tout en rappelant son ambassadeur en France.
En conséquence, Abdelmadjid Tebboune a dénoncé en octobre dernier les «mensonges» de la France sur la colonisation, et les autorités algériennes avaient arrêté au mois de novembre l’écrivain Boualem Sansal. La crise des influenceurs algériens en France, le refus d’Alger d’accueillir ses ressortissants expulsés, l’attentat d’un Algérien sous OQTF à Mulhouse et les sanctions réciproques visant des diplomates algériens et français ont également sévèrement aggravé les relations entre les deux pays ces derniers mois.